Shopping Day
@Salih M. Loman & @Ella Flores

J'avais fini une mission pour un cabinet d'assurances et Adrian étant absent, j'avais prévu de passer le reste de la journée à alterner netflix et bouquins. Enfin ça c'était le programme prévu avant que Salih m'appelle. Il passait me prendre. Pour aller où, aucune idée. Salih aimait bien les surprises. Pour un patron qui voulait se la jouer "gros dur", c'était un grand gamin adorable. Mais j'allais pas briser ses espoirs de devenir un patriarche mafieux craint. J'allais pas me mettre sur mon 31, mais j'allais me rendre présentable pour la "famille". Un jean, un pull en mohair blanc et un foulard rose pour habiller mon chignon fait rapidement, ça ferait l'affaire. Y'avait pas non plus besoin de se casser la tête pour ressembler à quelque chose de simple mais élégant. Je mettrais mes talons au dernier moment et ça serait réglé. J'entendis sa voiture arriver et je pris mes affaires avant d'aller à sa rencontre. J'ouvrisla portière et me laissait glisser sur le siège avant côté passager. Je n'eus pas vraiment à attendre avant de savoir où on allait, car Salih ne fit pas durer le suspence très longtemps. Les courses.

- Oh je suis la femme de la famille alors je suis la préposée aux courses? Je préviens boss, pour te faire pardonner, je veux des bonbons. Plein de bonbons.

Je savais bien qu'il n'était pas sexiste. Mais quand il tentait de jouer au méchant, il donnait parfois le baton pour se faire battre. Et je savais que ça allait le mettre mal à l'aise. Mais je voulais des bonbons. Et il avait joué au papa sévère alors j'allais lui rendre la pareille en jouant la sale gosse. Adrian était pas là en plus pour me lancer le regard de faux reproche, alors j'allais en profiter. Y'avait des bonbons en jeu, nan mais oh.

- Sinon je fais comme dans la pub pour les préservatifs. Toi le père, moi le gosse. J'en serais capable...

Le pire c'est que c'était vrai. J'en étais totalement capable. Je n'avais aucun problème avec le regard des autres sur moi. Sans doute car j'avais grandi au sein d'une famille où j'étais rejetée et où leur regard sur moi était un regard de mépris et de haine. Alors désormais les regards lourds de reproches venant d'inconnus, j'en avais rien à péter.
On venait de se garer et je sortais de la voiture. Salih me refila les sacs dans une nouvelle tentative d'autorité. Vu que cette fois, il me filait un ordre qui aurait pu être un de ceux qu'il aurait à un homme, je les  récupérais en souriant et avec un acquiessement de la tête.

- De toute façon, ça fait chef d'avoir quelqu'un qui porte pour toi. Mais sinon, on a aussi cet objet magique appelé un caddie. Ca roule et on peut faire des compétitions de course de caddie dans le magasin avec.

Je montrais du doigt les caddies avant de m'y diriger. J'en  récupérais un, balançait les sacs et retournait vers Salih. Je serais celle qui pousserait pour lui permettre de marcher devant tel le petit chef qu'il tentait d'être. J'aimais bien Salih, alors j'allais l'aider avec son défaut d'autorité.

Shopping Day
@Salih M. Loman & @Ella Flores

Salih mit un certain temps avant de se remémorer la pub dont je parlais.Et quand il me demanda si j'étais vraiment sérieux, je me contentais de le fixer, tout sourire, en silence. Ou l'art de répondre positivement, sans rien dire. Il ne me connaissait pas encore assez, ce qui expliquait qu'il m'avait demandé si j'en étais capable. Adrian, lui,n'aurait même pas posé la question, il aurait su que bien sûr que oui, je pourrais le faire. Puis Salih accepta, ou céda, pour les bonbons. Mais prit soin, rôle de chef mafieux oblige, de préciser que c'était parce que ce n'était pas cher.

- Bien évidemment...

Et il poursuivit en me félicitant pour ma tententive d'intimitation. Mais à sa remarque, je haussais les sourcils avant d'émettre un léger rire.

- Boss, je suis enquêtrice privée pour les assurances.

Et par conséquent, me dire que je m'améliorais, n'était pas forcément un compliment, parce que ça pouvait laisser entendre que je n'étais pas douée avant. Heureusement pour Salih, je savais qu'il tentait un compliment maladroit. Je pourrais dire qu'il était adorable de maladresse, mais vu qu'il cherchait à gagner en crédibilité de badassitude criminelle, je taisais mon élan de tendresse pour lui et me contentais d' hausser les épaules enreprenant cette fois ci le plus sérieusement du monde.

- C'est l'une des parties de mon job que d'intimider les fraudeurs. Entre autres compétences, tout aussi variées. Et je suis excellente dans mon domaine.

Parce que oui, je savais aussi comment entrer par effraction, voler en général, pirater un ordinateur et lire des comptes comptables pour tenter de dénicher un fraudeur. En tant qu'enquêtrice, je devais être capable de trouver qui mentais et si des objets étaient volés, je devais vérifier qu'il n'y avait pas tentative d'arnaque déjà puis ensuite je devais essayer de retrouver en parallèle de la police, les objets volés. Car tout objet retrouvé était un objet que les assurances n'auraient pas à rembourser. Il allait vraiment falloir que je brieffe Salih sur mes compétences professionnelles et sur celles de mon passif criminel. Parce que pour le moment, j'avais vraiment la sensation d'avoir été recrutée dans la famille en tant que boîte à pharmacie ambulante.

- Oh? Dommage. Je suis sûre que tu aurais gagné, boss.

Oui je le tentais. Oui c'était vil. Oui j'assumais pleinement mon rôle de tentatrice à conneries auprès de mon patron qui se voulait badass et sérieux. Et si Adrian avait été là, il aurait soit souri, soit m'aurait lancé un regard faussement réprobateur, au choix. Mais il n'y avait que moi. Et au passage, notons que j'avais allié tentation et compliment. C'était doublement vil. Et est-ce que j'avais honte de moi? Absolument pas.
Nous étions donc entré dans le vif du sujet "sérieux". Acheter de la bouffe. Mon domaine de prédilection. Je récupérais la liste et hochais un peu trop positivement la tête à la mention des bonbons. Je ne savais pas si je devais bénir ou maudir mon pouvoir de me permettre de manger autant sans prendre un gramme. Roh puis j'allais pas remercier mon don, il me prenait la tête au quotidien, fallait bien en tirer un truc de positif au moins.Nous étions donc à naviguer à travers les rayons, moi aux commandes du caddie, Salih aux commandes tout court. Enfin, il essayait et moi je l'encourageais en obéissant. J'étais pas du genre à aimer obéir aux hommes. A qui que  ce soit en général. Mais Salih fesait l'apprentissage de l'autorité et j'aimais bien Salih. Je préférais appartenir à une famille mafieuse dirigée par un faux méchant, que d'être seul à devoir affronter un vrai méchant. La famille était à la fois une protection et quelque chose qui me manquait. Qui nous manquait à Adrian et moi, car c'était lui qui m'avait vendu la famille. Bref, on disait souvent que derrière tout grand homme, il y avait une femme. Bah si besoin, je serais celle derrière Salih. Ca devait être la grande soeur en moi qui ressortait, et ce même si niveau âge, Salih aurait pu être...mon arrière grand-père, facile. J'avais l'âme maternelle et avec un bon coaching officieux, Salih avait un potentiel de leader. Le potentiel de méchant, c'était pas ça, mais le leader respecté, il avait toute ses chances.

- La meilleure marque est pas forcément la plus chère. Mais tu as demandé à la bonne personne de t'accompagner. Niveau bouffe, je maîtrise le sujet, pouvoir oblige. Et un bon chef ne prend pas ce qu'il y a de plus cher, il prend ce qu'il y a de meilleur. Parce qu'il sait reconnaître la qualité.

Et oui, le prix ne faisait pas la qualité. C'était trompeur, mais c'était ça la magie du commerce. On payait plus l'image que le goût. Mais je me promettais une chose. On sortirait des courses avec ce qu'il y avait de meilleur dans le caddie. Cecilio et Adrian me diraient merci. Surtout Cecilio, c'était souvent lui le cuistot.